Juncker élu : triste journée pour l'Europe (presse GB)
Gilles Klein - - 0 commentairesLa Grande-Bretagne va-t-elle inévitablement quitter l'Union Européenne ? C'est c'est ce que pense une partie de la presse britannique après le choix de Jean-Claude Juncker à la tête de l'Europe par 26 pays sur 28 pour un mandat de 5 ans. Une nomination qui devra être confirmée par un vote du Parlement européen le 16 juillet prochain. Mais surtout, une défaite écrasante pour le Premier ministre britannique qui lui est totalement opposé, et l'occasion pour la presse britannique de dire tout le mal qu'elle pense de Juncker, en mettant surtout en avant des facteurs personnels.
"Triste journée pour l'Europe. Bien sûr je suis déçu" a déclaré David Cameron ajoutant que la France, l'Allemagne et l'Italie ont fait une "grosse erreur" en ne cherchant pas à trouver un autre candidat plus consensuel : Juncker a rassemblé 26 pays, tandis que seul Cameron, et le Premier ministre Hongrois Viktor Orban étaient contre.
La session du Parlement britannique, lundi, risque d'être délicate pour Cameron qui va se faire pilonner par l'opposition. Mais Cameron pourra rappeler qu'il promet d'organiser un référendum sur l'appartenannce britannique à l'Union Européenne en 2017, s'il est réélu en 2015.
"La Grande Bretagne encore plus proche d'une sortie de l'Union Européenne après l'élection de Juncker" titre le Guardian comme le Daily Telegraph.
"Cameron écrasé et la Grande Bretagne est encore plus proche d'une sortie de l'Union Européenne" pour l'europhileThe Independent dont l'éditorial en page 2, est titré "Une défaite et un désastre" critiquant Cameron sans ménagement : "La gestion de l'affaire Junker par Cameron a conduit au pire". L'Independent accuse Cameron d'avoir transformé un soutien mitigé envers Juncker de la part des autres européens, en un soutien inconditionnel, à cause de son opposition frontale.
"Cameron le perdant, qualifié de Rooney de l'Europe" titre le Daily Mail en faisant allusion à Wayne Roney, l'attaquant de l'équipe anglaise éliminée du Mondial au Brésil, après avoir été battue par l'Italie et l'Uruguay.
Le quotidien descend en flammes Juncker, "élevé comme un catholique fervent" qui admettait pourtant ne pas se soucier de la vérité "quand les choses deviennent délicates, il faut mentir". En 2011, Juncker avait formellement démenti une réunion des ministres européens des Finances en pleine crise de l'euro, alors que la réunion avait bien eu lieu.
Pour le Daily Mail, Juncker méprise les gens qu'il est censé servir, et particulièrement les Britanniques. Oubliant de dire que Juncker est resté 18 ans Premier ministre du Luxembourg, le journal estime que la Commission Européenne accueille tous les politiciens qui échouent dans leur carrière, en indiquant que Juncker "a été viré" de son poste par les Luxembourgeois en décembre dernier. Il serait connu pour son mauvais caractère et sa susceptibilité. Il aurait constamment critiqué Margaret Thatcher il y a plus de 20 ans. Pire, c'est un ardent défenseur de l'élargisement de l'Union Européenne et il souhaite l'intégration de la Roumanie.
Pour le Daily Mail, il paraît nettement plus vieux qu'il n'est (59 ans). Ce serait le résultat d'une vie entière consacrée à la boisson, à fumer cigarette sur cigarette, et à l'abus du café noir. Le journal ajoute qu'il aime les bières fortes en alcool, mais cite quand même un journaliste qui déclare ne l'avoir "jamais vu ivre".
Cirsconstance aggravante aux yeux du tabloid britannique, Juncker vient du Luxembourg, un pays qui ne représenterait que 0,1 % de la population de l'union Européenne avec 515 000 habitants, tout en étant connu pour être un paradis de l'évasion fiscale qui ferait du Luxembourg, l'un des pays les plus riches du monde.
"En fait personne n'apprécie vraiment Juncker. Il n'essaie même pas de dissimuler ses intentions. Il est désagréable avec le personnel" dit Dan Hannan, un député britannique. Tandis que d'autres Euro-sceptiques se félicitent de sa nomination, et y voient une opportunité en or pour la Grande Bretagne, car elle conduira, inévitablement, leur pays à quitter l'Union Européenne.
Plus prudent que ses confrères pro ou anti-européens, tout en notant que le choix du président de la Commission européenne n'a pas fait l'objet d'un consensus pour la première fois dans l'histoire de l'Union Européenne, le Financial Times (FT) note que Cameron outre sa déception, a aussi déclaré que Juncker et lui devraient "travailler ensemble" et laisser "la réthorique de côté". Un changement d'attitude par rapport à ses déclarations qui ont précédé la nomination de Juncker. Peut-être motivé par l'espoir d'obtenir pour un Britannique un poste-clé dans la nouvelle administration européenne. Cameron voudrait rester dans l'Union si celle-ci est réformée, mais ses chances de succès sont faibles après cette défaite, sauf si ses partenaires font des concessions pour garder ce pays au sein de l'Europe.
Au passage le FT accuse Merkel d'avoir menti à Cameron, parce qu'il y a encore trois semaines, les autorités britanniques croyaient qu'elles étaient soutenues par la dirigeante allemande, dans leur opposition à Juncker. Quand on lui a posé la question, Merkel a répondu, selon le FT, qu'elle "ne commentait jamais les discussions internes entre leaders européens".
L'occasion de lire notre observatoireCognac et Gin Tonic, les armes anti-Juncker des presses britannique et allemande