Julien Coupat parle (Le Monde)
Dan Israel - - 0 commentairesBeau scoop pour Le Monde.
Le quotidien a mis en ligne vers 12h10 une (très) longue interview de Julien
Coupat, arrêté le 11 novembre à Tarnac. Il est présenté par la police et le
ministère de l'Intérieur comme le cerveau des "anarcho-autonomes" accusés d'avoir saboté des lignes SNCF en octobre et novembre dernier. Parmi les neuf
personnes mises en examen, il reste le seul incarcéré, malgré
quatre demandes de remises en liberté.
Le Monde lui
a fait parvenir des questions par écrit, auxquelles il a répondu dans la
longueur, s'exprimant sur les conditions de son arrestation, sur les
accusations portées contre lui et sur son analyse de l'état de la société.
Faisant référence à Foucault, Hegel ou Platon, ses réponses sont soigneusement rédigées
dans un style qui mêle l'ironie froide et la radicalité politique.
Il dénonce notamment "la fable médiatique" créée par la police autour du "groupe de Tarnac" et "le
mensonge public" qui en découle, en rappelant qu'une revendication
allemande s'est attribuée les sabotages dont il est accusé (comme nous le
rappelions ici).
Coupat s'en prend également aux "journalistes aux ordres (et notamment
dans Le Monde)" qui auraient
commis "les premiers articles dévoilant le terrible péril
que feraient peser sur toute vie sociale les «anarcho-autonomes»".
Il déclare également, malgré ce que soupçonne la justice, ne
pas être l'auteur du livre L'insurrection qui vient, rédigée par un
mystérieux Comité invisible. Mais il n'en assure pas moins que "tout ce
qui y figure est rigoureusement, catastrophiquement vrai, et ne cesse de s'avérer chaque
jour un peu plus" : "Ce qui s'avère, sous les dehors d'une «crise économique», d'un «effondrement de la confiance»,
d'un «rejet massif des classes dirigeantes», c'est bien la fin d'une
civilisation, l'implosion d'un paradigme : celui du gouvernement, qui réglait tout en
Occident."
Et il est vrai que le propos de Coupat se rapproche fortement de celui
de L'insurrection qui vient. S'aventurant sur le terrain politique, il dézingue
"l'extrême
gauche à-la-Besancenot", qui "n'a pas de perspective plus désirable à
offrir que la grisaille soviétique à peine retouchée sur Photoshop" et
les "bureaucraties syndicales, plus vendues que
jamais". Face "au gang sarkozyste", seule
compte à ses yeux "la rue, la rue et ses vieux penchants révolutionnaires".
La conclusion est une charge au canon contre "le ramassis d'escrocs, d'imposteurs, d'industriels, de financiers et de filles, toute cette cour de Mazarin sous neuroleptiques, de Louis Napoléon en version Disney, de Fouché du dimanche qui pour l'heure tient le pays". "Chaque pas qu'ils font vers le contrôle de tout, assure-t-il, les rapproche de leur perte."
Pour lire les nombreux articles que nous avons consacré à l'"affaire Coupat", reportez-vous à notre dossier. Et pour entendre l'éditeur Eric Hazan défendre les thèses de L'insurrection qui vient, suivez-le D@ns le texte dans notre émission. Cette émission est accessible à tous pour quelque temps... Enfin, Daniel Schneidermann consacre à cette interview sa chronique du 26 mai.