Impôts / France : débat entre économistes
La rédaction - - 0 commentairesChoix politique coupé des réalités économiques ou choix rationnel ? C'est le débat qui oppose Paul Krugman, prix Nobel d'économie qui critique ouvertement la dégradation de la note de la France par Standard & Poor's, et Philippe Aghion, professeur d'éco à Harvard et expert économique proche de Hollande pendant la campagne électorale. Ce dernier estime que Krugman se trompe et que la décision de Standard & Poors est assez logique.
"Le complot contre la France" titre le point de vue de Krugman, paru le 11 novembre en page 25 du New York Times. Pour lui, la décision de Standard & Poor's de dégrader le triple A de la France s'inscrit non pas dans un contexte économique, mais dans un environnement politique. Pour lui, ceux qui s'en prennent ainsi à la France n'ont rien à faire des déficits, ils utilisent la peur de la dette pour faire avancer un agenda politique. "Et la France, qui refuse ce jeu, est devenue la cible d'une incessante propagande politique négative", analyse ainsi Krugman, prix Nobel d'économie. Krugman ajoute : "cette notation est idéologique". L'Hexagone paye, selon lui, sa volonté "d'équilibrer son budget en relevant les impôts au lieu de sabrer dans la protection sociale". Et Krugman demande enfin si "S&P a une connaissance de l'intérieur de l'état des finances publiques françaises ? Non". Selon l'économiste, la France devrait enregistrer une meilleure performance de PIB par habitant que celle du Royaume-Uni. Il ajoute aussi que sa dette publique sera inférieure à celle de la Grande-Bretagne. Ce point de vue hautement politique mis en avant par Krugman a toutefois reçu une contradiction un brin inattendue. Celle de Philippe Aghion, ce professeur d'économie à Harvard qui a été l'un des conseillers de François Hollande pendant la campagne présidentielle de 2012. Dans une tribune publiée dans Le Monde, Aghion répond à Krugman. Il souligne d'abord que contrairement à ce qu'affirme le prix Nobel on ne sait rien des politiques de croissance qui marchent. |
| Peu enthousiaste sur l'impôt, Aghion ajoute qu'il "ne partage pas l'idée qu'une politique de réduction des déficits uniquement par l'impôt est sans conséquence pour l'emploi et la croissance. La comparaison entre la France et des pays comme l'Australie, le Canada, les Pays-Bas, et la Suède suggère en fait exactement le contraire. Ces pays ont choisi de remettre à plat leurs missions publiques afin de réduire leurs dépenses, plutôt que de s'attaquer comme la France au problème des déficits principalement à travers une augmentation massive des impôts." Il précise encore plus nettement sa pensée, critiquant clairement le choix économique actuel de la France : "Plus généralement, les comparaisons internationales montrent que les ajustements reposant sur les réductions de dépenses publiques ont permis de rétablir la croissance, tandis que l'ajustement basé sur des chocs fiscaux a entraîné des récessions fortes et prolongées". |