Fusillade : Netanyahu s'engage contre Enderlin
Daniel Schneidermann - - 0 commentairesRevoilà l'affaire Al Dura.
Cette fois, c'est le gouvernement israélien lui-même qui, endossant les conclusions d'un rapport qu'il a commandé, en arrive à la conclusion que les images de France 2, montrant la mort d'un enfant palestinien sous les balles israéliennes, tournées par le cameraman palestinien Talal Abu Rameh, et diffusées en 2000 sous la signature de Charles Enderlin, correspondant à Jerusalem, étaient truquées."Contrairement à l'affirmation du reportage selon lequel l'enfant est tué, le visionnage des images non montées par la commission (gouvernementale) montre que dans les scènes finales, qui n'ont pas été diffusées par France 2, on voit l'enfant vivant", souligne notamment le texte.
Inutile de revenir sur les multiples rebondissements de l'affaire (que nous avions, du mieux possible, résumées ici en 2008). Rien de neuf dans le rapport israélien, qui reprend les arguments traditionnels des anti-Enderlin (le père et le fils Al Dura n'ont pas été la cible de tirs israéliens, mais palestiniens. Et d'ailleurs, le fils n'est même pas mort, et le père n'est même pas blessé). La nouveauté, c'est que le gouvernement israélien, après treize ans de relative neutralité dans la controverse, se range finalement dans le camp des anti-Enderlin. Pourquoi maintenant ? Pourquoi pas plus tôt ? Seuls les services israéliens détiennent la réponse à cette question, et encore. Quant aux images, on peut toujours s'user les yeux sur le montage de France 2 ou sur les rushes, tous disponibles, on en concluera ce que l'on veut, selon ses convictions.
On voit bien l'intérêt des Israéliens à décrédibiliser les images de France 2, devenues emblématiques. Comme dans toutes les controverses de même nature (le mécanisme argumentatif des anti-Enderlin rappelle fortement celui de ceux qui croient la CIA responsable des attentats du 11 septembre), le meilleur traitement ne consiste certainement pas à les réfuter. La tâche est impossible: une hypothèse alternative surgit aussitôt sous l'hypothèse réfutée. Mieux vaut explorer, avec leurs défenseurs, les conséquences ultimes de ces hypothèses. Vous affirmez, Messieurs, que le père du petit Mohammed n'a jamais été blessé dans la fusillade ? Admettons. Alors examinons ensemble la liste des menteurs nécessaires au succès de cette gigantesque manipulation. Menteurs, les médecins militaires jordaniens qui l'ont opéré ? Menteur, le roi Abdallah qui lui a rendu visite à l'hôpital d'Amman ? Et l'enfant Mohammed Al Dura lui-même n'est pas mort ? Il est donc encore vivant. Pourquoi n'a-t-il pas été retrouvé ? C'est le seul traitement possible. Sans garantie de succès, évidemment.