France périphérique : Libé promeut (et dézingue) le livre de Guilluy

Robin Andraca - - (In)visibilités - 0 commentaires

Libération consacre 5 pages au dernier livre de Christophe Guilluy, La France périphérique. Dont plus de la moitié met en doute ouvertement les méthodes et les conclusions du géographe, qui avait déjà attiré notre attention lors de la dernière campagne présidentielle.

Dans ce nouveau livre intitulé La France périphérique, le géographe dénonce le désintérêt croissant du Parti Socialiste pour une frange entière de la société, éloignée des centres urbains et tentée par l'extrême droite.

"Bien sûr les thèses de Christophe Guilluy sont contestées par d’autres géographes ou par des sociologues spécialistes des mêmes sujets. Ce n’est pas parce qu’on est iconoclaste qu’on a toujours raison". Contestées, les thèses de Guilluy l'étaient déjà sur notre site en 2012 et le sont encore dans l'éditorial de Laurent Joffrin ce matin et dans les premières pages de Libé.

"Au final, le paradoxe du livre est de vouloir mettre en garde la gauche sur ses impensés, ses abandons coupables, tout en légitimant le discours identitaire d’une partie de la droite et de l’extrême droite : racisme anti-Blanc, peur de ne plus être majoritaire «chez soi», stigmatisation des élites mondialisées...". Parallèlement à la conclusion de son papier principal, le journal donne la parole à des chercheurs, sociologues, géographes. Leur point commun ? Tous réfutent les analyses du géographe.

Ainsi le chercheur en sciences sociales appliquées à l'urbain, Eric Charmes, considère que certaines des idées du géographe sont problématiques : "C’est tout le problème du positionnement politique de Guilluy qui semble pointer davantage les oppositions culturelles plutôt que celles qui peuvent exister dans un système économique de plus en plus inégalitaire. Déjà dans Fractures françaises, il faisait l’hypothèse d’une France minée par un «séparatisme culturel» avec, d’un côté, les minorités «visibles» qui concentrent l’attention dans les métropoles et, de l’autre, la France périphérique peuplée de ménages modestes blancs, ces «invisibles» dont on ne parle jamais et qui se sentent méprisés".

Enfin Violaine Girard et Jean Rivière, respectivement sociologue et géographe, en remettent une dernière couche en pointant deux carences du livre de Guilluy : le fait de s'appuyer sur "des catégories sociologiques et géographiques grossières" et de reposer sur une base empirique qui "semble faible". Les références citées par Guilluy (la démographe Michèle Tribalat, souvent citée par Marine Le Pen, un sondage Ifop pourValeurs actuelles affirmant que 67% des Français estiment que l’on en fait plus pour les immigrés que pour eux et un ouvrage d'Alain Finkielkrault) révèlent aussi, selon Girard et Rivière, un "prisme d'analyse particulier".

L'occasion de relire notre papier sur le précédent ouvrage de Christophe Guilluy : Fractures Françaises, la deuxième vie "d'un livre de gauche qui inspire la droite".

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