Etat d'urgence / COP21 : les milieux alternatifs visés
Anne-Sophie Jacques - - 0 commentairesLes militants écologistes muselés pendant la COP21 ? Outre les différents arrêtés interdisant les manifestations à "caractèrerevendicatif ou protestataire", des proches des milieux alternatifs ont fait l’objet de perquisitions voire d’assignations à résidence jusqu’au 12 décembre – c’est-à-dire au lendemain de la Conférence pour le climat – nous apprend ce matin L’observatoire de l’état d’urgence du Monde.
Nous le savions déjà : suite aux attentats du 13 novembre, la grande marche et l’action de masse prévues en marge de la COP21 qui se tient au Bourget du 29 novembre (soit un jour plus tôt que prévu) au 11 décembre ont été annulées. Depuis, partout en France, les préfectures prennent des arrêtés interdisant les manifestations sous couvert de la loi relative à l’état d’urgence. Exemple parmi tant d’autres : la préfecture d’Indre-et-Loire a récemment interdit "toute réunion ou manifestation de voie publique [...] sur l’ensemble du territoire du département, quel qu’en soit le motif, à l’exception des hommages aux victimes des attentats du 13 novembre 2015, pendant les journées du samedi 28 novembre 2015, du dimanche 29 novembre 2015, et du lundi 30 novembre 2015" comme le signale le site tourangeau La Rotative. En ligne de mire : "les manifestations à caractère revendicatif ou protestataire" par ailleurs énoncées en toutes lettres dans l’arrêté pris par la préfecture du Rhône, souligne le site.
Au-delà de ces interdictions, ce sont des militants zadistes et écologistes qui font l’objet de perquisitions. Ainsi, comme nous l’évoquions hier, le site Bastamag a raconté la perquisition d’un couple de maraîchers bio en raison de leurs activités militantes. En 2012, ils avaient bloqué le péage autoroutier de Mussidan pour protester contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Des perquisitions ont également eu lieu à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) nous apprend ce matin L’observatoire de l’état d’urgence du Monde.
Davantage encore : six personnes à Rennes ont été assignés à résidence ainsi qu’un membre de l’équipe juridique de la Coalition 21, structure qui regroupe près de 130 organisations – associations, ONG et syndicats – entendant peser sur l’accord de la Conférence pour le climat. L’homme en question, Joël Domenjoud, s’est vu assigné à résidence "au motif qu’il ferait partie de l’ultra-gauche parisienne qui veut remettre en cause la tenue de la COP" assure le site de la Ligue des droits de l’Homme qui s’offusque de cette décision et en demande la levée immédiate. Parmi les assignations que L’Observatoire du Monde a pu consulter, ces dernières "ont une durée limitée - jusqu’au 12 décembre, le lendemain de la fin de la conférence sur le climat - et visent clairement les éventuels mouvements revendicatifs qui pourraient entourer l’événement".
Face à "ces mesures de plus en plus arbitraires", pour reprendre les mots de la Ligue des droits de l’Homme, plusieurs collectifs appellent à ne pas renoncer aux manifestations. Outre l’appel à la désobéissance civile lancé par l’économiste et membre d’Attac Maxime Combes, plusieurs intellectuels invitent, à travers une tribune publiée le 24 novembre sur le site de Libération, à "braver l’état d’urgence" en manifestant dimanche place de la République à Paris. L'invitation est assortie d'une pétition qui a recueilli à cette heure plus de 3 000 signatures.
Selon les signataires – et parmi eux l’économiste Frédéric Lordon, bien connu de nos abonnés – "s’il existe quelque chose comme une valeur française, c’est d’avoir refusé depuis au moins deux siècles de laisser la rue à l’armée ou à la police. La mobilisation à l’occasion de la COP21 est un enjeu primordial et nous n’acceptons pas que le gouvernement manipule la peur pour nous interdire de manifester". Et de rappeler que "ceux qui voudraient manifester encourent 6 mois de prison. M. Valls va-t-il nous mettre en prison pour nous protéger des attentats ?"
>> L’occasion de relire notre article Etat d’urgence : la presse noyée sous les perquisitions