Elysée / Monde / écoutes : chasse aux sources
Sébastien Rochat - - 0 commentaires"C'est ignoble ce qu'a fait Le JDD". Invité de l'émission Mots Croisés, lundi 17 mars, le directeur de Mediapart, Edwy Plenel, était remonté comme une pendule. Pour quel motif ? Le JDD a révélé que le jour des révélations du Monde sur les écoutes de Sarkozy, François Hollande a reçu les deux auteurs de l'article. Info légitime ou chasse aux sources "ignoble" ?
Yves Calvi n'a même pas eu le temps de finir de poser la question sur le secret des sources que Plenel a bondi : "Depuis quand la presse fait la chasse aux rendez-vous des autres journalistes ? C'est ignoble ce qu'a fait Le JDD, là", s'emporte le directeur de Mediapart. Mediapart vs JDD La raison de sa colère ? Un article du JDD révélant que François Hollande avait rencontré les deux journalistes du Monde, Gérard Davet et Fabrice Lhomme, auteurs des révélations sur les écoutes de Sarkozy, le jour même de la publication de l'article. |
Comment le sait-on ? Le JDD a eu accès à "l'agenda confidentiel" de François Hollande, dressé par le secrétariat particulier du président de la République. C'est à 19h, le 7 mars, que Hollande les aurait reçus. "Un entretien surprenant, au terme d’une longue journée, ponctuée de onze autres rendez-vous", relève Le JDD qui publie un extrait de l'emploi du temps :
Et alors ? Sans l'écrire explicitement, l'article sous-entend que Hollande pourrait être une source des journalistes. "Officiellement, François Hollande n’est pour rien dans la divulgation de l’affaire. (...) Officiellement toujours, le chef de l’État n’a absolument pas géré le dossier". Et pourtant... il a rencontré ces journalistes. Interrogés au sujet de cette rencontre, Davet et Lhomme ont assuré que cette rencontre avait eu lieu "dans le cadre de la préparation d’un livre sur le quinquennat". Pour eux, aucun télescopage possible : "Le 7, lors de notre rendez-vous l’information était déjà sortie, et il nous fallait au moins deux jours pour préparer cet article".
Or, l'Elyse affirme n'avoir été "mis au courant des grandes lignes [de l'affaire] que le 4 mars, le jour des perquisitions chez Thierry Herzog". Et c'est en lisant Le Monde que Hollande aurait appris le détail des écoutes. "Le Président a-t-il informé les journalistes du Monde? Rien ne permet de l’affirmer, même si les deux reporters reconnaissent "des rencontres régulières" avec le chef de l’État depuis mai 2012", écrit Le JDD.
"off nécessaires", et "coupable connivence"
Ignoble cette chasse aux sources ? Dans un édito, la directrice du Monde, Natalie Nougayrède, a dénoncé ces accusations laissant entendre que Le Monde a participé à une "sourde conspiration politique" : "Faut-il rappeler que Le Monde exerce son métier d'informer dans la plus totale indépendance, hors de toute préoccupation partisane ? (...) Fera-t-on bientôt la liste de toutes les conversations en " off " entre journalistes et responsables politiques, en assimilant ces contacts, dont chacun sait qu'ils sont indispensables à l'exercice libre et rigoureux de notre métier, à une coupable connivence ?"
De son côté, Lefigaro.fr assure que le secrétaire général de l'Elysée, Pierre-René Lemas, a "sauté au plafond" en lisant Le JDD. "Très «agacé» par une fuite rarissime, Pierre-René Lemas a lancé une enquête interne pour tenter de déterminer d'où elle vient", affirme Lefigaro.fr. Car "très peu de personnes ont accès à cet agenda", confirme un "haut gradé" de l'Elysée. Sur France 2, le socialiste Jean-Christophe Cambadélis a estimé que ce mauvais coup venait d'un fonctionnaire de l'Elysée appartenant au clan Sarkozy : "A votre avis, c’est venu comment ? Ça s’est envolé comme ça en direction du JDD ? Ça veut dire que c’est un acte malveillant de quelqu’un à l’Elysée en direction de l’opposition. Parce qu’on n’a pas fait le nettoyage…". La chasse à la taupe est ouverte.