Désertion des médias à Bruxelles (Quatremer, Libération)
La rédaction - - 0 commentaires Jean Quatremer va-t-il être le dernier des Mohicans-journalistes à Bruxelles ? Le correspondant de Libération au sein des institutions européennes constate sur son blog que l'effectif des journalistes présents en permanence dans la capitale belge fond comme neige au soleil.
Jean Quatremer va-t-il être le dernier des Mohicans-journalistes à Bruxelles ? Le correspondant de Libération au sein des institutions européennes constate sur son blog que l'effectif des journalistes présents en permanence dans la capitale belge fond comme neige au soleil. |
Quatremer suggère plusieurs explications à la désertion des journalistes à Bruxelles. D'abord la crise économique, qui, certes, a durement frappé les journaux, mais il met aussi violemment en cause les choix fiscaux de la Belgique. "Il faut savoir que les charges sociales, notamment patronales, sont par exemple 30% plus élevées qu’en France ou en Grande-Bretagne, et que les salaires bruts sont ponctionnés de plus de 50% (sécurité sociale et impôts divers). Si en période faste, les médias sont prêts à payer ce surplus de charges sociales et à compenser le manque à gagner fiscal de leurs journalistes (soit un doublement de la charge salariale pour l’entreprise en dehors des frais de fonctionnement), ce n’est plus le cas en période de crise", écrit-il. "Or, en dépit des demandes répétées de ses partenaires, la Belgique a toujours refusé le moindre accommodement, par exemple en accordant aux journalistes le droit de rester rattaché socialement et fiscalement à leur pays d’origine (ce qui se fait dans nombre de pays, par exemple en France)."
Un paradoxe étonnant, selon Quatremer, puisque le gouvernement belge "oublie" que ces journalistes, considérés comme des "immigrés comme les autres", "ne sont en Belgique qu’à cause de la présence des institutions communautaires." Il évoque même des journalistes obligés de s'installer à Lille ou aux Pays-Bas pour échapper à cette situation coûteuse et continuer à traiter l'actualité européenne.
Autres raisons avancées par Quatremer : un intérêt pour les questions européennes qui a "incontestablement faibli" et la mise en place, suite à la chute de la commission Santer, d'une communication ultra verrouillée. Les journalistes, explique Quatremer,"sont abreuvés de nouvelles souvent peu importantes, mais qu’ils n’osent pas ne pas traiter de peur que leurs rédactions le leur reprochent. D’où une série de papiers sans intérêt et horriblement technocratiques, ce qui alimente le désintérêt pour les questions européennes." Résister à cette tendance demande une solide expérience européenne de la part des journalistes, qui souvent quittent le poste au moment où ils l'ont acquise, déplore le journaliste de Libération.