Des anonymous publient des listes de pédophiles

Laure Daussy - - 0 commentaires


Des activistes de la nébuleuse Anonymous diffusent sur Internet, depuis le 8 juillet, des listes d'individus, les présentant comme des utilisateurs de sites pédophiles. L'histoire a retenu l'attention du Monde.fr, des sites du Nouvel obs et de France Télévisions.

C'est un peu la méthode de la justice américaine, qui consiste à publier un annuaire des délinquants sexuels condamnés par la justice. Pour lutter contre la pédophilie, des internautes se revendiquant d'Anonymous ont publié sur le site de partage de documents en ligne Pastebin des informations personnelles sur des personnes fréquentant des sites pédophiles. Les citoyens dénoncés sont en majorité néerlandais et belges. Ils sont aussi Français, Anglais, Irlandais, Australiens, et sont cités avec leurs coordonnées (adresse postale, numéro de téléphone, e-mail, profil Facebook ou adresse IP.

Le premier dossier envoyé sur le site de partage de document a été visionné 33 000 fois jusqu'à ce jeudi soir. Les trois autres dossiers, entre 15 000 et 17 000 fois.

Le 8 juillet, une vidéo a été publié sur YouTube pour présenter cette nouvelle opération. Sur la vidéo, un individu portant le célèbre masque des Anonymous explique que "récemment, il y a eu une augmentation du nombre de sites Web de chat et de partage de photos pédophiles. (...) Anonynous veut réduire, si ce n'est éradiquer, ce fléau d'Internet."

Les activistes proposent même aux internautes de suivre leur "opération anti-pédophilie", baptisée #OpPedoChat, en temps réel sur le compte Twitter @TheAnonOne et d'envoyer des informations complémentaires s'ils en ont.

D'où viennent ces listes de citoyens ? Aucune information ne permet de le dire avec certitude, selon Lemonde.fr. Les pirates informatique pourraient se les être procurées grâce au piratage de forums de sites pédophiles. Le Nouvel obs parle aussi de "délation".

Ce n'est pas la première fois que des Anonymous s'attaquent à des sites pédophiles : en octobre 2011, le collectif avait lancé l'opération #OpDarknet avec le même objectif. Les hackers avaient diffusé les adresses de 1 500 utilisateurs présumés du site pornographique "Lolita City". Le FBI a été invité à prendre connaissance des listes de noms divulguées, mais aucune communication n’a été faite par la suite, précise Francetv.fr.

Dans l'un des documents diffusés le 8 juillet, le nom d'un élu local du parti nationaliste flamand, le Vlaams Belang, est cité, ainsi que ses adresses email et postales. L'homme politique, interrogé par la presse belge, nie les faits, et affirme que la boîte mail est une ancienne adresse, piratée il y a quelques années, relate le Monde.fr.

La méthode utilisée suscite des critiques. Pour Dirk Depover, porte-parole de l'association Child Focus, qui lutte en Belgique contre la pédopornographie sur Internet, l'action d'Anonymous aura des effets pervers, et risque même d'être "contre-productive". "Beaucoup d'adresses de personnes qui ne sont pas pédophiles ont probablement été publiées, et pour eux, cela va avoir des conséquences graves. Et si l'on marginalise les personnes coupables, en citant leur nom sur le Net, elles deviennent des parias, et n'ont, ensuite, plus aucun intérêt à collaborer pour se faire soigner."

"On peut se demander si ce genre d’actions n’est pas plutôt une entrave aux enquêtes", analyse également Jean-Marc Manach, journaliste du site Owni, spécialiste de la protection de la vie privée, interrogé par Francetv.fr.. Il rappelle aussi que le piratage de données personnelles est contesté au sein même du mouvement : "Dans l’éthique hacker, on ne révèle pas de données personnelles et on n’interdit pas aux autres de s’exprimer [en piratant et en bloquant des sites]."

L'action pourrait toutefois être utilisée par la justice : Lieve Pellens, porte-parole du parquet fédéral, explique au Monde.fr que des enquêtes pourront être ouvertes à l'encontre des personnes identifiées par Anonymous comme pédophiles présumés. Mais les hackers pourraient eux aussi faire face à la justice, selon la police fédérale belge.

Lire sur arretsurimages.net.