Couverture Nouvel Obs et droit à l'image

Dan Israel - - 0 commentaires


Voici une jeune femme qui a dû être surprise lorsqu'elle a croisé la couverture du numéro de la semaine du Nouvel Observateur.



Pour illustrer son dossier sur la contestation de la réforme des retraites, l'hebdomadaire a choisi d'utiliser en pleine page et en gros plan le visage d'une manifestante, qui avait inscrit "Non à la réforme" sur sa joue.

La photo, signée du photoreporter de l'AFP Joël Saget, est belle et saisissante… mais peut-être problématique sur le plan juridique. En effet, selon nos informations, l'AFP n'a pas demandé l'autorisation de la jeune femme pour diffuser cette image. Théoriquement, elle pourrait donc attaquer en justice, soit l'auteur de la photo, soit l'Obs pour défendre son droit à l'image.

Au service photo du magazine, on indique que "la jurisprudence est assez floue sur ce point", mais on indique "qu'en général, il faut utiliser des photos de groupe, au moins sept personnes, pour ne pas prendre de risque". Impossible en revanche de savoir si le magazine a officiellement demandé l'autorisation de la jeune femme.


Et si elle attaquait le magazine, l'issue serait incertaine pour elle. La dernière affaire judiciaire qui a fait du bruit dans ce domaine date de 2006. Elle est citée dans la brochure (en PDF) de l'Observatoire de l'image, collectif monté par des photoreporters et des magazines pour "énoncer les contraintes et pratiques abusives qui pèsent en matière d'illustration, et de sensibiliser les médias, les magistrats et l'interprofession sur les problématiques liées au droit de photographier, de filmer et de publier". En 2006, Le Parisien, Paris Match et Choc avaient publié des photos d'une jeune femme agressée à Paris en marge des manifestations anti-CPE. La jeune femme les avait assignés, en jugeant les images humiliantes. Mais "le tribunal a rejeté ses demandes au nom du droit à l’information, a constaté l’absence d’atteinte à la dignité de la jeune femme, et a remarqué qu’il n’y avait pas de recherche de sensationnel de la part des rédactions", indique la brochure.

Plus tôt, en 2002, L'Expressavait été condamné à la demande de deux jeunes femmes, photographiées à genoux pendant les JMJ en 1997. Mais le contexte était différent : leur photo illustrait un article titré "Dieu est-il misogyne?" et elle pouvait être considérée comme appuyant une affirmation de l'article, jugeant que certaines femmes se contentent du rôle secondaire qui leur est imposé par la religion.

Mais l'exemple le plus connu de photo de jeune femme manifestante est le cliché de Jean-Pierre Rey, pris en Mai 68 à Paris, et auquel Alain korkos avait consacré une chronique.

picto Il avait été publié d'abord dans le magazine américain Life, puis régulièrement republié.

Comme Elle l'expliquait en 2008, Caroline de Bendern, la femme de la photo, photographiée sans son accord à 23 ans, a attaqué le photographe à trois reprises, mais a perdu à chaque fois, "les tribunaux considérant qu’il s’agissait d’une illustration d’évènements historiques".


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