Coup de filet bidon : des "islamistes" témoignent (Le Monde)
La rédaction - - 0 commentairesOn avait pressenti le plan com', il ne restait plus qu'à l'incarner avec des témoignages concrets. Mercredi 4 avril, après l'affaire Merah et les arrestations de membres de Forsane Alizza, les forces de l'ordre organisaient un nouveau coup de filet contre des islamistes présumés. Tous ont finalement été relâchés sans être poursuivis par la justice. Dans Le Monde, une famille dont deux frères ont été interpellés sans raison, témoigne de l'humiliation vécue et de la légèreté des charges qui étaient retenus contre eux.
Saad et Farid ont respectivement 28 et 22 ans. Ils vivent à Pau et ont été interpelés en tant qu'islamistes présumés. Pourquoi ont-ils été ciblés par la police ? "Un périple de quatre mois effectué entre septembre 2011 et janvier 2012 par Farid et Saad en Inde, en Birmanie, en Thaïlande et au Cambodge, juste après le bac pro de menuisier-aluminium du benjamin, a suffi à les cataloguer «présumés activistes isolés se préparant au djihad»", explique Le Monde.
Malgré un journal de bord indiquant bien qu'il s'agissait d'un périple touristique et le témoignage d'une collègue d'un des frères confirmant qu'ils ne sont pas allés en Afghanistan pendant leur séjour en Inde, Saad et Farid ont été maintenus en garde à vue jusqu'au vendredi. Dans le commissariat pourtant, plusieurs signes indiquaient que l'affaire n'était pas sérieuse : "De temps en temps, on entendait dans le commissariat, «Ils sont encore là, les terroristes ?»" sourit Farid.
Un policier demandant à Saad de coopérer pour prendre ses empreintes lui aurait dit : "Allez, t'es là pour vingt-quatre heures, c'est une histoire de merde, ne va pas te mettre bêtement un délit sur le dos !" A leur sortie, sur le ton de la plaisanterie, un autre policier leur aurait lancé de ne pas devenir "trop paranos". Ce qui ne fait particulièrement sourire les avocats des deux frères, Mes Thierry Sagardoytho et Julien Marco : "Si le voyage en Asie de nos clients posait question, une convocation au commissariat suffisait, s'insurge l'un des avocats. Pour placer quelqu'un en garde à vue, il faut des indices laissant présumer la commission d'une infraction. Or, les enquêteurs ne disposaient d'aucun élément. Alors que Mohamed Merah, repéré par la DCRI (direction centrale du renseignement intérieur), n'a pas été inquiété avant ses assassinats, on peut s'étonner que des gens ne figurant même pas dans les fichiers locaux du renseignement intérieur fassent l'objet d'un tel traitement". |
La famille des deux frères aurait aimé avoir des "excuses" de la part de Claude Guéant pour "sa grossière erreur". Elle peut sans doute attendre.
Un nouvel élément pour notre dossier : "Islamistes : derrière l'épouvantail".