Chambres à gaz : 30 000 euros d'amende requis contre Dieudonné

Anne-Sophie Jacques - - 0 commentaires

"Je suis comique, je ne donne pas des cours d'histoire" : entendu mercredi 28 janvier à l’occasion de son procès pour "provocation à la haine raciale" après ses propos visant le journaliste de France Inter Patrick Cohen – et qui furent à l’origine de l’interdiction de son spectacle Le Mur – Dieudonné s’est borné à répéter que "c’était pour rire" comme le rapporte Libération. Pour la procureure citée par l’AFP, ces propos sont une expression de mépris de Dieudonné à l'égard de la communauté juive. Ce dernier – multi-condamné et parfois relaxé comme nous le racontions ici – encourt une peine de 30 000 euros d'amende.

Souvenez-vous : en décembre 2013, un reportage de Complément d'enquête (France 2) diffusait en caméra cachée un extrait du spectacle de Dieudonné Le Mur dans lequel l’humoriste s’en prenait au journaliste de France Inter Patrick Cohen en ces termes : "Tu vois, lui, si le vent tourne, je ne suis pas sûr qu’il ait le temps de faire sa valise" ou encore "Quand je l’entends parler, je me dis, tu vois, les chambres à gaz… Dommage". Cohen était dans le viseur de Dieudonné depuis que le journaliste avait estimé quelques mois plus tôt que certaines personnalités – qualifiées de cerveaux malades, dont Soral, Dieudonné, l'écrivain Marc-Edouard Nabe ou le théologien Tariq Ramadan – ne devraient plus avoir accès aux médias… Un point de vue que ne partageait pas Daniel Schneidermann et qui fut le point de départ d’une polémique à rebonds qui commence ici et se finit à peu près .

Suite à la diffusion de cet extrait auquel s’ajoutent le passage "Je n’ai pas à choisir entre les juifs et les nazis, je suis neutre dans cette affaire. Qu’est-ce qui s’est passé, qui a provoqué qui ? […] J’ai ma petite idée" ainsi que la chanson "Shoah nanas", le spectacle Le Mur a été interdit par décision du Conseil d’Etat. Dieudonné a alors remplacé son spectacle par un autre consacré à l'Afrique et expurgé de propos antisémites, comme nous le racontions ici. Parallèlement, le parquet a ouvert une enquête pour "incitation à la haine raciale" suite à la plainte déposée par La Licra, le Bureau de vigilance contre l'antisémitisme et l'association Ben Gourion. De son côté, Cohen ne s’est pas constitué partie civile et il n’a pas non plus été entendu comme témoin.

Pour sa défense, comme le rapporte Libération présent au procès qui se tenait hier, Dieudonné affirme vouloir répondre "sur le terrain du rire à des agressions me visant. […] Quand Patrick Cohen parle de «cerveau malade», c’est une référence à de vieux poncifs sur l’homme noir qui aurait moins d’intelligence. J’ai choisi de répondre par l’humour." Pas par l’antisémitisme ? "Mais non, l’antisémitisme, ça ne fait pas rire les gens. Alors que là, les gens se sont bien amusés." Ce n’est pas l’avis de la procureure citée par l’AFP qui évoque une "antienne" d'attaques contre les juifs à travers le spectacle incriminé et "une expression de mépris de M. M'bala M'bala [le nom de Dieudonné] à l'égard de la communauté juive". Quant à l’avocate de la Licra interrogée par Libé, "les spectacles de Dieudonné sont devenus des tribunes dans lesquelles il répond à ses condamnations, et on a le sentiment qu’il va de plus en plus loin à chaque fois. Et lorsqu’il dit que les juifs sont des «négriers reconvertis dans la banque», c’est de l’humour ? Et qu’il faut être «juif pour avoir la liberté d’expression en France»" ?" 30 000 euros d’amende – ou 300 jours de prison – ont été requis.

>> L'occasion de voir ou revoir notre émission "Raciste, fraudeur fiscal, Dieudonné est dans l'air du temps!"

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