Cahuzac : Sud-ouest connaissait-il l'enregistrement ?

Que savait exactement Sud-Ouest ? Depuis qu'a éclaté l'affaire Cahuzac, Mediapart n'est pas le seul média en pointe sur ce dossier. Le quotidien Sud-Ouest a également sorti plusieurs informations de première main : par exemple, l'existence de la bande-son clandestine (Mediapart ne parlait alors que d'une "trace"dans son premier article) ou le profil de son mystérieux détenteur, présenté comme une personne "honorablement connue". Autant d'indices qui pourraient laisser penser que Sud-Ouest était au courant de cette affaire avant la parution de l'article de Mediapart.

Pour tout savoir sur le feuilleton "Cahuzac chez les Suisses", il ne faut pas seulement lire Mediapart. Il faut aussi jeter un œil sur Sud-Ouest. Mercredi 5 décembre, le quotidien régional est le premier à évoquer l'existence d'une bande-son : "Les rares personnes qui disent être au courant du contenu de cette bande-son précisent que Jérôme Cahuzac aurait fait une fausse manœuvre avec son combiné. Si bien que son interlocuteur précédent aurait entendu et dupliqué les propos tenus par la suite lors d'un nouvel échange téléphonique", écrit le quotidien mercredi matin, avant le deuxième article de Mediapart et la mise en ligne de la bande-son.

Autre élément nouveau révélé dans l'article : l'apparition d'un cabinet de détectives. "L'un des représentants de cette officine installée dans les beaux quartiers de la capitale était à pied d'œuvre il y a quelques semaines en Lot-et-Garonne. La personne qui l'a mandaté ne souhaite visiblement pas que du bien au ministre du Budget. Le privé aurait fait état à ses interlocuteurs du fameux compte suisse, citant des chiffres et reprochant même au ministre ses contacts anciens avec trois laboratoires pharmaceutiques",indique Sud-ouest. Ne vous fiez pas au titre de l'article, Sud-Ouest a bien de nouvelles infos sur l'affaire Pourquoi un détective enquêterait-il sur Cahuzac ? Peut-être parce que celui-ci est, selon Sud-Ouest, en instance de divorce. Une séparation qui serait conflictuelle. De là à voir dans cette affaire une vengeance de la femme de Cahuzac...

Jeudi 6 décembre, le quotidien régional publie un deuxième article. À propos des conditions de la conservation de la bande-son, Sud-Ouest précise qu'après "avoir fait extraire [les propos] de son répondeur par un expert, son interlocuteur les aurait fait déposer chez un notaire". Et le quotidien d'ajouter : "Selon toute vraisemblance, l'original de la fameuse bande-son se trouve aujourd'hui en Lot-et-Garonne. L'utilisation de cette conversation piratée ne va pas sans poser des difficultés juridiques. Raison pour laquelle son détenteur, honorablement connu, refuse toujours de dévoiler son identité." "Honorablement connu", l'expression est lâchée. Sud-Ouest connaît-il le nom du détenteur de la bande-son ? Depuis quand le quotidien était-il au courant de l'existence de cette affaire et des rumeurs de l'existence d'un compte suisse ?

Joint par @si, l'auteur d'un des deux articles, le journaliste Yann Saint-Sernin, ne nous a pas vraiment laissé le temps de poser toutes nos questions. À peine avions-nous évoqué l'objet de notre appel, qu'il nous répondait qu'il "n'avait pas le temps". Depuis quand étiez-vous au courant de l'existence de cette bande-son ? "Je ne veux pas répondre, je vous renvoie vers l'article, on est plusieurs à travailler sur l'affaire, je ne veux pas répondre." Fin d'une conversation de 15 secondes (sans bande-son).

Et si vous avez raté les premiers épisodes de ce feuilleton, lisez notre récit du Début d'un bras de fer entre Mediapart et Cahuzac.