Bygmalion / F2 : l'entourage de Sarkozy attaque... à coups de SMS

Juliette Gramaglia - - Investigations - 0 commentaires

L'entourage de Nicolas Sarkozy contre-attaque face à Envoyé Spécial... et publie le SMS d'un journaliste sur Twitter.

Après la diffusion d'un documentaire sur l'affaire Bygmalion, dont l'entourage de l'ancien président, mis en examen pour "financement illégal de campagne électorale", avait tenté de retarder la diffusion (comme @si vous le révélait), la conseillère en communication de Sarkozy, Véronique Waché a interpellé sur Twitter le journaliste d'Envoyé Spécial Tristan Waleckx. Elle lui reproche un manque de "déontologie", et affirme n'avoir exercé "aucune pression" sur des témoins (ce dont l'accuse Waleckx dans son enquête), mais avoir simplement reçu "un appel de quelqu'un affolé d'avoir été manipulé".

A quoi Waché fait-elle référence ? Elle réagit au témoignage inédit de Laurent Ferlet. Cet ami de Carla Bruni a composé l'hymne de campagne de Sarkozy en 2012. Selon son témoignage, cet hymne aurait coûté près de 86 000 euros... bien plus que ce que l'équipe de campagne avait déclaré à l'époque. Selon Waleckx, qui en parlait à Télérama, Ferlet s'était ensuite inquiété de l'impact de son témoignage après avoir reçu un appel de Waché.

Cette dernière affirme de son côté n'avoir jamais exercé de pression sur Ferlet, qui aurait été manipulé par le journaliste... et elle publie pour preuve un SMS de Waleckx au compositeur. Que dit ce SMS ? Waleckx y répond à Ferlet, qui semble avoir des "doutes" : "Comme je te l'ai dit, notre reportage a pour but de rétablir l'honneur des prestataires qui ont participé à cette belle campagne de 2012 en leur donnant la parole et en montrant la réalité de leurs prestations", écrit le journaliste dans son message. Un SMS que Waleckx ne dément pas. En réponse au Tweet de Waché, le journaliste d'Envoyé Spécial écrit que ce message confirme que "Ferlet savait que nous tournions un sujet sur la réalité des prestations en 2012". Il ajoute : "Vous confirmez posséder un échange privé entre journaliste et témoin de documentaire ? Curieux pour quelqu'un qui a exercé «zéro pression»".

Bataille par Tweets interposés

Contactée par leHuffington Post, Waché affirme que Waleckx a "manipul[é] ses interlocuteurs" en leur présentant le sujet sous un faux jour (la "transparence financière" et pas l'affaire Bygmalion). Toujours au Huffington Post, le journaliste affirme lui avoir toujours présenté clairement son sujet, et raconte que plusieurs prestataires contactés "ont refusé de lui répondre, effrayés par «le caractère radioactif de l'affaire Bygmalion»." "Une preuve supplémentaire selon l'enquêteur que ses interlocuteurs savaient pertinemment de quoi traiterait le reportage", écrit le Huffington Post.

Mais la bataille par Tweets interposés ne s'arrête pas là. En réponse à Waleckx, qui lui demande une réaction "sur le fond", Waché a publié sur Twitter un autre SMS, écrit par elle-même. Un SMS "que vous n'avez pas jugé utile de montrer à l'antenne", accuse Waché. Waché y explique pourquoi l'équipe de Sarkozy ne répondra pas à Envoyé Spécial : "Nous ne serons pas votre caution d'équilibre factice pour faire croire à votre public que votre travail est sans parti pris en oubliant les principes élémentaires d'une procédure judiciaire" (l'équipe de Sarkozy reproche à Envoyé Spécial d'avoir donné la parole à Franck Attal, mis en examen dans l'affaire Bygmalion, alors que l'affaire est encore en cours).

De son côté, Waleckx a réagi ce matin : "Votre unique réponse sur le fond était donc de dire que vous ne répondriez pas. C'était mentionné dans le reportage". Waleckx dit vrai : jeudi soir, Elise Lucet rappelait même sur le plateau qu'aucun membre de l'entourage de Sarkozy, ni même ce dernier, n'avait voulu répondre à leurs multiples sollicitations.

L'argumentation de Waché est dans la droite ligne de la défense de Sarkozy par ses proches, comme le rappelle notamment le Huffington Post : depuis la diffusion du documentaire, les soutiens de l'ancien président critiquent "une enquête exclusivement «à charge»" et dénoncent un service public "très partisan et très partial".

MAJ 04/10/2016 : Mention de l'article de Télérama, dans lequel Waleckx évoque les pressions de Waché sur Ferlet.

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