Boulin : pas de réouverture de l'enquête, malgré des scellés disparus

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Une ombre de plus dans l'affaire Robert Boulin.

La justice n'examinera pas à nouveau les circonstances de la mort du ministre du travail de Valéry Giscard d'Estaing, retrouvé allongé dans 50 cm d'eau dans un étang des Yvelines, le 30 octobre 1979. Pour le procureur général de Paris, il n'y a pas de charges nouvelles… même si une partie des scellés a disparu !

A l'époque, l'enquête avait conclu au suicide de Robert Boulin, mais comme nous l'avons raconté en détail ici, cette version est contestée par plusieurs journalistes et par la fille du ministre. En mars, cette dernière avait officiellement demandé la réouverture de l'enquête. C'était le dernier épisode d'une longue bataille : en 1983, la famille de Boulin avait porté plainte, mais l'enquête s'était soldée par un non-lieu. En 2002, le parquet de Paris avait procédé à de nouvelles auditions, sans qu'elles débouchent sur la reprise de l'instruction. Et en 2007, une autre demande s'était soldée par un refus du procureur général.

Hier, le parquet général s'est à nouveau opposé à ce que la justice se penche encore une fois sur l'affaire. Une semaine plus tôt, la garde des Sceaux, Michèle Alliot-Marie, avait déjà affirmé que le dossier était "clos". Rien de bien surprenant dans cette décision. Ce qui est beaucoup plus étonnant, en revanche, c'est l'aveu de la volatilisation d'un tome du dossier d'instruction, qui contenait notamment huit lettres que Boulin aurait envoyé à ses proches juste avant sa mort. Pour ceux qui ne croient pas à la version officielle, ces lettres sont suspectes, et seraient des faux, envoyés pour accréditer la thèse du suicide.

Des scellés qui disparaissent dans le coffre-fort d'un tribunal pour une affaire sensible ?

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Dans l'extrait que nous avons sélectionné, la fille de Boulin parle d'autres mystérieuses disparitions. Et elle a raison. En 1980, le sang de Robert Boulin, entreposé à l'institut médico-légal, a disparu. Les opposants au suicide pensent que l'analyse de ce sang aurait permis de montrer qu'il avait été drogué. En 1983, on constate que les poumons de Boulin, conservés au même endroit, ont aussi disparu, au moment où la famille demandait à faire analyser l'eau qu'ils auraient pu contenir, afin de savoir si elle provenait bien de l'étang où le ministre a été retrouvé. Les autres prélèvements d'organes ont aussi été détruits, dans des circonstances peu claires…

Cependant, assure le parquet, et contrairement à ce que signale Bakchich, en pointe sur le dossier, ce n'est pas parce que les scellés ont disparu que l'enquête ne reprendra pas. En effet, la demande était principalement fondée sur les nouveaux témoignages, révélés par France Inter, d'un ancien ministre gaulliste, Jean Charbonnel, et de la fille d'Alexandre Sanguinetti, membre du Service d'action civique (Sac), le sulfureux service d'ordre du gaullisme. "Les témoignages qualifiés de nouveaux, soit ne le sont pas, soit sont constitués de relations indirectes de propos très généraux tenus par des personnes décédées depuis longtemps et relatifs à leur propre opinion sur l'affaire", estime le procureur général dans son communiqué.

Par ailleurs, dans son texte, le magistrat évacue la demande d'une recherche d'empreintes génétiques sur les timbres des fameuses huit lettres disparues, manifestement alors qu'on ne savait pas encore qu'elles s'étaient volatilisées. Fabienne Boulin espérait qu'en examinant les traces ADN sur les timbres, on pourrait prouver que son père ne les avait pas touchés, et n'avait donc pas lui-même envoyé les lettres. Le procureur a jugé que "des analyses ADN ne pourraient en aucune façon faire l'objet d'une comparaison utile, dans la mesure où jamais aucune personne n'a été mise en cause ou hors de cause dans ce dossier".

L'avocat de Fabienne Boulin, Me Olivier Morice a annoncé que sa cliente allait assigner l’Etat pour "dysfonctionnement grave du service de la justice". La Garde des Sceaux, elle, a ordonné "une inspection des services judiciaires pour que la lumière soit faite sur la disparition d’une partie du dossier et des scellés", a fait savoir le porte-parole de la Chancellerie.

Vous n'avez pas compris à cette ténébreuse affaire ? Replongez dans l'émission que nous lui avons consacrée.

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