Boulevard Le Pen

Daniel Schneidermann - - 0 commentaires

Mélenchon et Besancenot côte à côte sur le plateau du Grand journal.

Car attention, événement planétaire, ils marcheront ensemble contre l'austérité, le 12 avril. Côte à côte pour la première fois sur un plateau ? Je ne sais pas. Il y a peut-être des précédents. En tout cas, le diabolique réalisateur de De Caunes a réussi son coup. Deux blocs. Deux monolithes de l'île de Pâque, dans un étrange et majestueux duo. La grande houle de l'abstention et de la colère les a poussés l'un contre l'autre, mais les corps résistent. Quand parle l'un des deux, l'autre bloque immédiatement son système respiratoire, comme pour éviter d'attraper la grippe aviaire. Et vice-versa. Des fois que l'internationalisme, ou le patriotisme, se chopent comme des virus, sait-on jamais. Bref, entre défiler ensemble et parler la même langue, il y a un fossé. Ces deux-là, on leur conseillerait bien un petit week-end ensemble dans le Vercors. Si des recompositions doivent s'effectuer à gauche, ou à la gauche de la gauche, il faudra continuer de compter sur la base, comme à Grenoble, qui fera vaciller les monolithes. Ou pas.

Déboule Elisabeth Lévy, en avocate du nouvel académicien Finkielkraut. Alors, dites-nous, Elisabeth, le FN est-il entré à l'Académie ? "Finkielkraut combat le FN" répond-elle sérieusement. Sacrée Elisabeth. Sacrée bonne copine. Toujours le mot pour rire. Il est vrai que même Libé, ce matin, trouve que Finkie "gagne à être connu". Sûr que si tous les Arabes, tous les Blacks, tous les illettrés, tous les incultes, tous les internautes barbares qu'il voue à la haine, prenaient le temps de prendre le thé avec lui, ils le trouveraient sûrement très émouvant. Mélenchon, quoiqu'en désaccord avec le nouvel Immortel, confesse qu'il trouve le philosophe "troublant", l'obligeant à explorer "un angle mort de notre pensée". On ne saura pas ce qu'en pense Besancenot. Il est temps de passer au zapping. Ca vaut sans doute mieux pour l'idylle naissante.

Un peu plus tard, c'est boulevard Le Pen, sur France 2. Des paroles et des actes n'est pas une émission, c'est un jeu video, où Super Marine, des heures durant, pulvérise les bananes, dézingue les boucliers, et gagne des vies. Bing bing bing. Ecrabouillés Saint-Cricq, Lenglet, Lamassoure, et le petit nouveau, le président du club de rugby de Toulon, Mourad Boudjellal, à qui la châtelaine de Saint Cloud balance froidement sa montre à 150 000 euros. Comme les jeux video, tout est fait pour créer l'addiction, et ça pourrait bien ne jamais s'arrêter. D'ailleurs, cela s'arrête-t-il parfois ? Je vous laisse, je vais tourner notre émission de la semaine. Sujet : le Rwanda.

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