Bettencourt : l'affaire repart, les scoops aussi

Dan Israel - - 0 commentaires

L'affaire Bettencourt est un interminable feuilleton politico-judiciaro-familial. Le nouvel épisode en a été lancé conjointement par Mediapart, hier, et Le Monde, aujourd'hui.

Les deux médias révèlent qu'un examen médical a constaté que les capacités mentales de Liliane Bettencourt, l'actionnaire principale de l'Oréal, étaient altérées. Et que la bataille avec sa fille, Françoise Bettencourt-Meyers, est prête à repartir de plus belle, malgré le protocole d'accord qu'elles avaient signé fin décembre pour enterrer la hache de guerre.

La fille s'inquiète en effet du récent investissement que la mère a réalisé dans les affaires de Stéphane Courbit. Le 1er juin, Les Echos avaient annoncé que Bettencourt avait signé un chèque de de 143 millions d'euros à Lov Group, la holding du producteur de téléréalité, ancien patron d'Endemol.

Or, a souligné Mediapart hier (accès payant), "ce qui pose question, c'est que l'opération a été effectuée par le nouvel avocat de la milliardaire, le fiscaliste Pascal Wilhelm", qui "est également le conseil de Stéphane Courbit, et celui de Jean-Marie Messier – dont la banque est intervenue comme conseil dans l'opération!"

Curieux mélange des genres. Surtout, souligne le site d'info, lorsqu'on sait que l'avocat est aussi devenu le protecteur, au sens juridique du terme, de Bettencourt. En effet, le protocole d'accord prévoyait un examen médical de Liliane Bettencourt, et la mise en place d'"un mandat de protection future", signé finalement fin janvier. Le site officiel de l'administration française précise que ce mandat permet à quiconque de désigner à l'avance celui qui sera chargé "de veiller sur sa personne et/ou sur tout ou partie de son patrimoine, pour le jour où elle ne serait plus en état, physique ou mental, de le faire seule". Le mandat se déclenche lorsqu'un expert médical constate l'incapacité. Hier, Mediapart a révélé que cet examen médical avait eu lieu. En clair, M° Wilhelm gère les affaires, et l'argent, de Bettencourt. Comme le souligne Mediapart, la milliardaire l'avait elle-même annoncé, discrètement, au cours d'une longue interview au Figaro en avril, déclarant à propos de l'avocat : "C'est quelqu'un de très bien, de très sérieux, organisé et pointilleux, en qui j'ai une grande confiance. C'est mon avocat et mon protecteur au sens juridique du terme."

Ce matin, Le Monde a rebondi sur son site en publiant un article qui sera complété dans l'édition papier de l'après-midi. Il précise que le 25 mars, la juge des tutelles de Courbevoie a validé l'examen médical, en estimant que "les facultés cognitives de Mme Liliane Bettencourt sont nettement altérées par une maladie cérébrale" et qu'elles mettent la milliardaire dans "l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts".

Surtout, Le Monde annonce que Françoise Bettencourt-Meyers, inquiète notamment de l'argent confié à Courbit, a relancé une action en justice, pour "mieux assurer la protection juridique de sa mère, Liliane". On se souvient que la fille de la milliardaire avait multiplié, depuis 2007, les poursuites pour abus de faiblesse et autres demandes de mise sous tutelle. Mais les différends avaient été présentés comme réglés lors de la signature du protocole d'accord…

Il y a une semaine, lorsque LesEchos avaient annoncé, sous l'égide du groupe de communication Image 7, assure Mediapart, que Bettencourt prenait 20 % du groupe de Courbit, le ton était bien différent. Nul article n'avait fait mention d'une quelconque défaillance de Bettencourt. Le journal financier assurait même qu'elle s'était bien penchée sur la question, puisqu'elle souhaitait investir "dans des secteurs intéressant ses petits enfants, puisque le holding a vocation à être transmis" et qu'elle "aurait été séduite par la personnalité d'entrepreneur de Stéphane Courbit". Seul Le Point s'était permis de relayer la remarque ambigüe d'un "proche du dossier" : "Vous aurez remarqué que depuis qu'elle s'est rabibochée avec sa fille, Liliane Bettencourt a, comme par enchantement, retrouvé tous ses esprits." Sans qu'on comprenne exactement le sens de cette remarque.

Mise à jour - 15 heures : Le bâtonnier de Paris, qui assure la présidence du Conseil de l'ordre des avocats, a annoncé au site du Parisienqu'il allait ouvrir "dès aujourd’hui une enquête déontologique" sur le cas de M° Wilhelm. Le fait de conseiller à Liliane Bettencourt de s'associer avec Courbit, dont il défend aussi les intérêts, serait "totalement interdite" par les règles de déontologie. "Me Pascal Wilhelm est un très remarquable confrère, indique le bâtonnier. Je suis stupéfait qu’il ait pu faire ça. Si ce que rapporte la presse est vrai, cela pose une vraie question."

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