Berlusconi : pourquoi le tribunal l'a condamné

Silvio Berlusconi a été condamné à 7 ans de prison pour prostitution de mineure et abus de pouvoir pour avoir fait libérer la jeune fille en question, Ruby. Tous deux avaient formellement nié avoir eu des relations sexuelles, mais le tribunal s'est appuyé sur des écoutes téléphoniques.

"Berlusconi : la condamnation la plus sévère" titre la Repubblica dans son édition du jour après que Silvio Berlusconi ait été condamné hier par le tribunal de Milan. L'information est à la Une de toute la presse italienne. Le tribunal présidé par Giulia Turri condamne Berlusconi pour des relations sexuelles avec mineure, entre février et mai 2010, et abus de pouvoir pour l'avoir fait libérer. Il écope de 7 ans de prison, alors que la procureure Ilda Boccassini avait demandé 6 ans. Et il fait, de plus, l'objet d'une interdiction de toute fonction publique à vie. Pourtant, Berlusconi n'est pas près d'aller en prison : il a fait appel et dénoncé, dans un communiqué, la "persécution" dont il fait l'objet. Mieux, il affirme que "les juges n'avaient aucune raison réelle de le condamner" et que cette sentence vise "à l'éliminer de la vie politique du pays". Face à cette condamnation, une question demeure : pourquoi exactement Berlusconi (76 ans) a-t-il été condamné pour prostitution d'une mineure ? La jeune Karima El Mahroug, surnommée Ruby (née au Maroc, elle a 17 ans au moment des faits) et lui même niaient avoir eu des relations sexuelles. Et aucun témoin direct n'attestait d'une éventuelle relation sexuelle entre eux.

Tout a commencé le 11 janvier 2011, lorsque le Corriere della Sera révèle que la justice enquête sur Berlusconi soupçonné d'abus de pouvoir et prostitution de mineure. On l'accuse d'avoir fait pression sur la préfecture de police de Milan pour obtenir la libération de Ruby lorsqu'elle a été arrêtée pour le vol d'une montre valant 3 000 euros, dans la nuit du 27 au 28 mai 2010. Berlusconi, alors Président du Conseil, avait demandé qu'elle soit remise à une élue de son parti, Micole Minetti, en expliquant que la jeune fille était la nièce du président égyptien Moubarak. Le procès de Berlusconi débute en avril 2011 à Milan. Il était accusé d'avoir payé Ruby pour une dizaine de relations sexuelles, et d'avoir abusé de son pouvoir pour la faire libérer.

Mais c'est en avril 2012, que La Repubblica publie des transcriptions d'écoutes téléphoniques réalisées par la police en octobre 2010. Ces écoutes sont à la base de cette condamnation. Ruby y disait à une amie (Antonella) "Berlusconi me donne 47 000 euros par semaine, c'est fou, complètement fou". Elle ajoutait "Silvio m'a téléphoné. Il a dit :"je te donnerai tout l'argent que tu veux, si tu es discrète et que tu ne parle de rien à personne". Dans une autre conversation, Ruby assure que Berlusconi est prêt à lui donner plus de 4 millions d'euros. Ruby a répété ces accusations devant les procureurs, avant de les retirer. Parce qu'elle a touché de l'argent pour se taire, analyse le tribunal.

D'autres jeunes filles ont aussi évoqué les soirées "spéciales" qui se déroulaient chez Berlusconi. Mais comme l'ensemble des 32 témoins, elles se sont rétractées devant le tribunal, qui envisage des poursuites pour faux témoignages. Les jeunes filles appelées à témoigner par la défense touchent chacune 2500 euros par mois depuis 2010... "parce que cette affaire les a ruinées" explique, sans rire, le généreux Berlusconi.