Balladur 95 : 23 millions de francs suspects (Le Monde)

Dan Israel - - 0 commentaires


Le financement de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995 apparaît de plus en plus suspect aux yeux des juges d'instruction Roger Le Loire et Renaud Van Ruymbeke, qui enquêtent sur le volet financier de l'affaire de Karachi. Mais les dernières révélations du Monde semblent privilégier la piste des fonds secrets, plutôt que celle de rétrocommissions liées aux ventes d'armes.

Le Monde révèle aujourd'hui en détail l'état des investigations dans cette instruction (article disponible gratuitement sur le site, et coupé en trois articles distincts dans l'édition papier).

Alors qu'on savait déjà que l'ancien Premier ministre avait du mal à justifier l'origine d'un versement de 10,25 millions de francs (1,26 million d'euros) en liquide sur son compte de campagne, Le Monde indique que les sommes litigieuses se montent en fait à "23,6 millions de francs (l'équivalent aujourd'hui de 3 millions d'euros), dont 20 millions en espèces".

@si a déjà raconté comment les 10,25 millions ont failli empêcher Balladur de voir ses comptes de campagne validés par le Conseil constitutionnel. S'y ajoutent notamment 2,7 millions censés correspondre à des "collectes d'espèces",1,4 million qui serait justifié par des remboursements de voyage en train de sympathisants, et 1,6 million par un hypothétique règlement de repas par des militants. La société chargée de la sécurité des meetings aurait aussi été payée en liquide, pour plus de 5 millions de francs.

La piste des fonds secrets ?

Tous ces versements ont été faits en billets de 500 francs, ce qui jette le doute sur leur origine. Mais, alors que les juges devaient vérifier si cet argent ne provenait pas de rétrocommissions versées dans le cadre de contrats d'armements, les éléments recueillis par les enquêteurs, tels que décrits par Le Monde, renvoient plutôt vers une utilisation par Balladur des "fonds secrets", cet argent liquide qui était mis à disposition des ministères, jusqu'à ce que Lionel Jospin l'interdise, en 2002. C'est seulement en bas de page que les journalistes du quotidien relancent la thèse des rétrocommissions, qui a été défendue le 20 juin devant Van Ruymbeke par l'ancien contrôleur général des armées Jean-Louis Porchier (qui l'avait déjà affirmé)

Que l'une ou l'autre piste se vérifie, Balladur est dans une position compliquée, parce qu'il n'avait de toute façon pas le droit d'utiliser cet argent pour financer sa campagne. Est-ce pour cette raison qu'il a tenté de faire reporter l'audition par le juge de son ancien trésorier de campagne, René Galy-Dejean, et de le conseiller sur le choix d'un avocat ? C'est Galy-Dejean lui-même qui a confié au juge que l'ex-Premier ministre le lui avait proposé, ce qu'il a refusé. Et c'est la dernière révélation du Monde.

C'est peut-être une nouvelle direction à suivre dans notre dossier Karachi, un Watergate français ?

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