Algérie : coups bas dans la guerre de succession

Gilles Klein - 4 février 2014 - 0 commentaires

Le patron du FLN, le parti au pouvoir, accuse d'incompétence le général qui commande les services de sécurité algériens. La tension monte en Algérie, trois mois avant la prochaine élection présidentielle entre le FLN, favorable à un 4e mandat de Bouteflika, et les militaires, opposés. Un quotidien prend position en faveur du général et, à la Une appelle "homo" le chef du FLN.

C'est la guerre entre ceux qui, comme le FLN, soutiennent la candidature du président Bouteflika, affaibli par la maladie, et les militaires qui tiennent une bonne partie des leviers du pouvoir, qui sont, eux, contre. Depuis hier c'est même la guerre ouverte, le patron du FLN accuse le général qui commande les services de sécurité, d'être un incapable qui aurait du démissionner depuis longtemps face à la série d'assassinats politiques et d'attentats terroristes qui ont secoué l'Algérie au cours des dernières années. Répondant aux critiques du FLN lancées hier, un quotidien prend le parti des militaires en insultant à la Une le patron du FLN qu'il traite "d'homo"

"Graves accusations de Saadani contre l'institution du DRS et son patron Toufik" "Quand un homo provoque un homme !"

Dans la polémique qui oppose deux factions du pouvoir algérien, avec d'un côté le secrétaire général du FLN, le parti qui gouverne l'Algérie, Amar Saadani, et de l'autre le général Toufik, le tout puissant patron des services de renseignement, Le Jeune Indépendant prend ouvertement position pour le général.

En bas de Une du journal (fondé en 1990), l'éditorial de Nordine Mzalla accuse Saadani d'être un "barbouze"

Interrogé par Jeune Afrique, l'éditorialiste justifie la Une du journal. "C’est de l’humour au second degré, tente-t-il de se justifier. Pour nous, c’était un parallèle par rapport aux personnes qui avouent publiquement leur homosexualité." Et "ce n’est pas plus nauséabond que ce qu’Amar Saadani a dit à propos du patron du DRS et de cette institution militaire."

Saadani a été élu patron du FLN (qui soutient l'actuel président Bouteflika malade depuis plusieurs mois, mais pourtant candidat à sa propre succession) en août 2013. Mais il a déja beaucoup d'ennemis qui lui reprochent, en vrac, des fraudes électorales, des liens avec des hommes d'affaires douteux etc...

La polémique a commencé lorsque Saadani a déclaré au site d'information TSA (Tout sur l'Algérie), que les services de renseignement ont, comme leur patron, échoué et "failli dans la protection et la sécurité du président Mohamed Boudiaf", assassiné le 29 juin 1992. "Il n’a pas su protéger Abdelhak Benhamouda" secrétaire général du grand syndicat algérien UGTA assassiné le 28 janvier 1997, "ni les moines de Tibehirine, ni les bases de pétrole dans le Sud, ni les employés des Nations unies en Algérie, ni le Palais du gouvernement. Cette direction n’a pas su bien protéger le président Bouteflika à Batna où il avait été la cible d’une tentative d’assassinat. A mon avis, Toufik aurait dû démissionner après ces échecs. "

Et surtout Saadani a accusé Toufik de vouloir l'éliminer politiquement : “Pour le FLN, des colonels ont approché des membres du Comité central pour me destituer. La sécurité intérieure ne peut pas nier qu’elle agit sous les ordres du général Toufik. Ce département outrepasse ses prérogatives“.

Pour le site Algérie Focus, Saïdani a été mandaté par la Présidence de la République et le clan de Bouteflika, pour “dégommer” le général Toufik.

Le FLN aurait pour "but de préparer le lancement de la campagne pour une 4e mandat de Bouteflika à la tête de l’Etat. Un 4e mandat qui ne suscite nullement l’enthousiasme de nombreux colonels au sein du DRS. Ces colonels fidèles au général Toufik orchestrent, d’ailleurs, une campagne de destabilisation pour saboter le projet politique des partisans de Bouteflika."

Algérie Focus s'étonne, par ailleurs, que le débat politique algérien dérape ainsi, alors que la presse, comme Le Jeune Indépendant, dépend économiquement de l'Etat.

"Faut-il déduire que toute personne qui s’attaque au général Toufik est par conséquent «homosexuel», à savoir un homme qui manque de virilité, d’honneur et de dignité? C’est le message que veut nous délivrer ce quotidien national qui bénéficie de la manne publicitaire publique, et donc de l’argent du contribuable algérien?"

Faut-il déduire que toute personne qui s’attaque au général Toufik est par conséquent «homosexuel», à savoir un homme qui manque de virilité, d’honneur et de dignité? C’est le message que veut nous délivrer ce quotidien national qui bénéficie de la manne publicitaire publique, et donc de l’argent du contribuable algérien? - See more at: http://www.algerie-focus.com/blog/2014/02/algerie-apres-la-guerre-des-clans-la-dangereuse-derive-mediatique/#sthash.omZcD9i9.dpuf