Affrontements inter-communautaires (presse algérienne)

Gilles Klein - - Silences & censures - 0 commentaires

Affrontements inter-communautaires sanglants en Algérie. La presse française parle beaucoup des tensions en Egypte, mais pas du tout des incidents qui voient depuis quelques semaines les communautés mozabite et arabe s'affronter, avec violence, dans la vallée du M’zab, dans le sud du pays, sous l'oeil de la police, accusée de laisser faire quand les arabes s'en prennent aux mozabites.

"Ghardaïa : au coeur d'un conflit communautaire" titre Liberté le 30 décembre 2013

A 600 km au sud d'Alger, la petite ville de Ghardaïa (un peu plus de 90 000 habitants) est au coeur d'affrontements qui opposent les Mozabites (littéralement "Fils du Mzab", un groupe ethnique qui parle le berbère) et les Arabes.

Une tension qui persiste depuis une vingtaine d'années, mais augmente avec la crise économique.

Il y avait eu des affrontements entre jeunes en août dernier à Ghardaïa, mais limités. Puis tout semble s'être enflammé le 22 novembre dernier à la suite d'un match opposant deux équipes de football locales, l'une mozabite, l'autre arabe à Guerrara, située à une centaine de km de Ghardaïa.

Au cours de ces affrontements, des dizaines de maisons ont été pillées ou incendiées ainsi que des véhicules et des édifices publics, tandis que la police procédait à près de 150 arrestations.

 

 

En décembre, la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH) a, à plusieurs reprises, dénoncé "fortement les agissements scandaleux des services de police sensés représenter une institution républicaine, en usant de pratiques inhumaines et dégradantes".

De nombreuses personnes, arrêtées à Guerrara, se sont, en effet, plaintes de violence et de sévices de la part des policiers qui se seraient acharnés sur les Mozabites.

Mais le contrôleur de la police déclare à la Une de Liberté le 13 janvier "Le pire a été évité à Ghardaïa".

Dans un premier temps, la direction de la communication et des relations publiques de la Sûreté nationale a démenti "les accusations “d’arrestations sélectives et raciales” et de “mise à nu, torture et harcèlement sexuel pratiqués sur des détenus à l’intérieur des postes de police” .

La LADDH a maintenu ses accusations estimant que les comportements policiers "laissent croire que les forces de police algériennes se comportent comme les forces d’occupation américaine en Irak notamment dans la prison d’Abu Ghraib."

laissent croire que les forces de police Algériennes se comportent comme les forces d’occupation Américaine en Irak notamment dans la prison d’Abu Ghraib. - See more at: http://www.algerie-focus.com/blog/2013/11/conflit-a-guerrara-les-forces-de-police-se-comportent-comme-les-forces-doccupation-americaine-en-irak-dapres-la-laddh/#sthash.4jApEnJX.dpuf

Début décembre une commission parlementaire venue d'Alger a confirmé ces accusations. Puis un Mozabite, âgé de 34 ans, qui avait été retrouvé dans la rue, grièvement blessé, est décédé le 12 décembre.

La DGSN (Direction générale de la sureté nationale) a finalement décidé d'ouvrir une enquête, tandis que 2 500 policiers et 3 000 gendarmes arrivaient en renfort des quatre coins du pays. Mais cela n'a pas calmé la situation.

picto Le 21 janvier, Liberté constate à la Une que "Le gouvernement est en panne de solutions".

Fin décembre des commerces mozabites situés dans le quartier arabe de Ghardaïa ont aussi été incendiés et pillés. La police est intervenue, il y a eu des dizaines de blessés.

Ces rivalités sont aussi provoquées par la crise et le chômage, alors que les Mozabites sont accusés de dominer l'économie de la région de la vallée du M'Zab connue des touristes car elle abrite des villages fortifiés classés au patrimoine mondial de l'UNESCO, dans une zone sauvegardée, classée espace culturel et historique par le gouvernement algérien depuis juin 2005.

Editions d'El Watan parues, dimanche (ci-dessous, à gauche) et vendredi, où le quotidien annonçait, à la Une, un deuxième décès.

Sur YouTube, plusieurs vidéos montrent policiers et habitants arabes côte à côte en train de jeter des pierres en direction de mozabites. L'attitude partiale de la police a été reconnue mais de manière très limitée.

Comme l'indique la Nouvelle République à la Une, la DGSN a annoncé que trois policiers vus sur une vidéo en train de commettre des violences ont été suspendus et présentés "devant les juridictions compétentes" en tentant de limiter les dérapages à ces seuls policiers filmés.

Une décision confirmée à Alger, par le ministre de l'Intérieur : "si les dépassements de certains éléments de la police à Ghardaïa représentent des crimes selon le code pénal, ceux-ci doivent être présentés devant la justice".

Par ailleurs, ce week-end encore, la région a été marquée par une flambée de violence, cette fois entre groupes de jeunes à Berriane (45 km de Ghardaïa), où des commerces ont été incendiés : "Dans la nuit du vendredi au samedi, une voiture appartenant à un Arabe a été incendiée avec à son bord son conducteur. Des jeunes ont alors riposté en brûlant un kiosque et deux restaurants appartenant à des Mozabites. Les affrontements entre les deux communautés ont donc éclaté."

pictoLa Nouvelle Republique lundi 27 janvier 2014

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